Les étapes-clé de mon ABS

Une des plus-values de l’analyse des besoins sociaux est la grande liberté conférée aux centres communaux et intercommunaux d’action sociale dans sa réalisation. La flexibilité qu’elle offre permet d’adapter sa démarche, son mode de réalisation, ses ambitions, la forme de son rendu aux enjeux propres du territoire et aux ressources disponibles. 

La souplesse du cadre réglementaire permet ainsi d’imaginer des formes très variées d’ABS et de faire preuve de créativité. Il peut cependant être utile de disposer de repères pour organiser la conduite du projet dans sa commune/intercommunalité. Un exemple de déroulé est donc proposé ci-après, mais celui-ci ne doit pas être considéré comme le modèle-type à suivre.

Le temps consacré à chaque étape peut varier d’un CCAS/CIAS à l’autre, néanmoins l’article R123-1 du code de l’action sociale et des familles précise que le diagnostic sociodémographique de l’analyse des besoins sociaux doit faire « l’objet d’un rapport présenté au conseil d’administration au cours de l’année civile qui suit chaque renouvellement général des conseils municipaux », (soit un rendu des conclusions de la prochaine ABS en 2021 dans le prolongement des municipales de 2020). Prévoir le lancement de la démarche au plus tôt s’avérera donc utile pour mobiliser l’ensemble des parties prenantes de l’ABS (équipes du CCAS, élus et professionnels de la ville, partenaires publics ou privés, habitants…) et permettra de disposer du temps indispensable à chaque étape de la démarche. 

A noter : le déroulé ci-dessous n’englobe pas la réalisation des analyses thématiques complémentaires qui peuvent démarrer en 2021 à l’issue du diagnostic sociodémographique.

Etape 1 /Cadrer son projet d’ABS
  • Définition des ambitions de l’ABS

    • Dresser la liste des objectifs stratégiques de l’ABS propres au territoire (exemples : progression du dialogue entre élus et opérationnels, interrogation des pratiques professionnelles, révision d’un règlement d’aides facultatives, précision du périmètre du CCAS par rapport aux autres intervenants du territoire…), des sujets à traiter en priorité (précarité, accès aux droits, insertion professionnelle…) et des approches à privilégier (angle qualitatif ou quantitatif, aide à la décision politique, dynamique partenariale, participation citoyenne…).

  • Revue des moyens disponibles et choix de la modalité de réalisation de l’ABS

    • Faire le bilan des ressources dont la structure dispose pour réaliser l’ABS (budget, temps humain, compétences disponibles…).
    • Lister les appuis existants sur le territoire (présence d’un observatoire, d’une Union départementale de CCAS/CIAS active sur l’ABS, accès à des données ou des publications antérieures…).
    • Choisir la modalité de réalisation de l’ABS : interne au CCAS/CIAS (ressource déjà disponible, ou bien emploi d’un CDD / stagiaire ?), recours à un prestataire, mutualisation de ressources via l’association à un groupement de communes, réalisation dans le cadre de l’intercommunalité ou d’une Union départementale de CCAS/CIAS, etc. 

     

  • Elaboration d’un retroplanning réaliste

    • Détailler les phases du projet d’ABS, les différentes tâches et les échéances à respecter.
    • Prévoir une marge dans le planning pour être certain d’atteindre l’objectif d’une présentation en 2021 du rapport de portrait sociodémographique auprès du Conseil d’administration du CCAS/CIAS.

  • Définition des instances de pilotage

    • Constituer un comité de pilotage : opter si possible pour un portage de l’ABS par un binôme « élu et professionnel » du CCAS/CIAS.
    • Le cas échéant, en fonction des enjeux de l’ABS sur le territoire et de la configuration du CCAS/CIAS, constituer un comité de suivi plus opérationnel ou plus ouvert (avec par exemple l’invitation de chercheurs ou d’un CCAS/CIAS voisin pour bénéficier d’un regard extérieur…).
    • Identifier les différents acteurs à solliciter pour réaliser le portrait sociodémographique, constituer des groupes de travail (professionnels d’autres services communaux ou intercommunaux, administrateurs du CCAS/CIAS, autres acteurs du territoire, usagers du CCAS/CIAS, citoyens…).
    • La participation de partenaires du CCAS/CIAS à l’ABS est requise pour répondre à l’exigence suivante du Décret n°2016-824 du 21 juin 2016 : « Ce diagnostic est établi avec l’ensemble des partenaires, publics ou privés, qui participent à la mise en œuvre des actions de prévention et de développement social ».

     

     

Mémo : à cette étape, penser à…
  • Capitaliser sur les démarches passées d’ABS : tirer le bilan des dernières ABS réalisées dans la structure (forces et points d’amélioration) ou de retours d’expériences de CCAS/CIAS alentours ou de taille similaire.
  • Communiquer des informations sur l’ABS dès son lancement pour susciter l’intérêt, à la fois en interne au CCAS/CIAS et à l’extérieur.
Etape 2 /Réaliser son portrait sociodémographique
  • Mise à plat des hypothèses

    • Formulation des hypothèses de départ sur le profil sociodémographique de la population, état des lieux des perceptions du territoire communément partagées. 
    • Liste des questionnements auxquels l’ABS devra répondre (exemple : certaines tranches d’âges sont-elles plus marquées que d’autres par la pauvreté ? La politique communale/intercommunale doit-elle prendre en compte ces différences et si oui de quelles façons ?). 

  • Collecte des données

    • Recueil de données sur le profil des habitants du territoire et leurs besoins : 
      • Structure et dynamique globale de la population
      • Zoom sur les différents publics : l’enfance et la petite enfance, la jeunesse, les personnes âgées, les personnes handicapées, etc.
      • Zoom sur les thématiques-clés : précarité, formation, emploi, logement, santé, etc. 
    • Recueil de données sur l’offre sociale existante pour répondre aux besoins de la population : 
      • Description par thématique-clé, public cible, dispositifs, acteurs…  
    • Agréger différents matériaux et intégrer 2 dimensions complémentaires, aussi bien pour la description des besoins que celle des réponses proposées : 
      • Une dimension quantitative, avec le recensement de données statistiques, de données d’activité, d’indicateurs chiffrés, etc. 
      • Une dimension qualitative, avec le recensement de données de ressenti, issues d’échanges informels ou d’entretiens, du traitement de commentaires libres issus de questionnaires, etc. 
    • Mobiliser différentes sources : 
      • Pour les données de nature quantitative : statistiques publiques, données d’observatoires, données recueillies par divers partenaires (CAF, CPAM, Conseils départementaux, Pole Emploi, etc.), données internes au CCAS/CIAS ou à la Ville/Intercommunalité, etc. 
      • Pour les données de nature qualitative : perceptions des élus, professionnels, partenaires, chercheurs, usagers, habitants, etc.

  • Traitement des données

    • Comparaison des données dans l’espace et dans le temps : 
      • Comparaison entre les données recueillies et celles de territoires pertinents (de taille similaire par exemple), afin de faire ressortir les particularités de sa commune/intercommunalité. Pour les territoires où cela est possible, détail des données infracommunales afin d’appréhender les spécificités de chaque quartier. 
      • Comparaison entre les dernières données disponibles et les jeux de données antérieurs et si possible réalisation de projections / analyses de tendances à partir des courbes d’évolution.
    • Travail sur la présentation des données : construction de tableaux, graphiques, cartographies… 
    • Travail de pédagogie sur les données (définition des indicateurs, explication de la méthodologie utilisée, etc.) pour que l’ABS soit accessible à tous.
    • Croisement des besoins et des réponses apportées : analyse de la couverture des besoins par l’offre disponible, de l’adéquation des politiques publiques locales aux caractéristiques de la population.

    A noter : cette tâche est cruciale, l’ABS doit servir à évaluer l’adéquation de l’offre de dispositifs/services/équipements par rapport aux besoins pour en faire découler une feuille de route stratégique pour le CCAS/CIAS et ses partenaires. 

  • Analyse partagée

    • Invitation de divers acteurs à participer à l’ABS : 
      • Elus et professionnels du CCAS/CIAS et de la Ville/Intercommunalité
      • Partenaires institutionnels (Conseil départemental, CAF, CPAM, Pôle Emploi, bailleurs sociaux…)
      • Observatoires, chercheurs
      • Associations locales
      • Usagers du CCAS/CIAS, habitants
      • Autres, selon la pertinence sur le territoire (exemples : commerçants, médecins…).
    • Organisation de moments d’échanges entre ces acteurs pour partager leurs données et leurs perceptions du territoire, présenter les dispositifs/services/équipements offerts et les besoins qui leur sont remontés, les problématiques rencontrées, les tendances remarquées.
      • Pour éviter un surnombre de participants aux réunions et gagner en efficacité, il est possible -voire conseillé- de répartir l’ensemble des parties prenantes de l’ABS dans des groupes de travail thématiques, en fonction de leur champ d’intervention et de la nature de leur expertise. 
    • Travail collectif d’interprétation des données :
      • Mise à profit des connaissances de terrain et des expertises complémentaires, des approches et expériences variées afin d’éviter toute interprétation erronée des données.

    Construction d’une analyse commune de l’adéquation de l’offre aux besoins présents et futurs de la population, diagnostic partagé des enjeux actuels et à venir du territoire.

  • Construction de premières pistes d’actions

    • Déduire de la confrontation entre les données sur les besoins des habitants et les données sur l’offre qui leur est proposée des pistes d’intervention pour le CCAS/CIAS, mais aussi plus globalement pour les politiques communales/intercommunales, voire pour les autres acteurs du territoire. 
      • Ces préconisations peuvent porter sur de nouveaux projets à déployer, mais également sur des dispositifs existants à questionner / repositionner auprès d’autres publics / dont la communication est à redimensionner, ou bien sur des partenariats à approfondir avec d’autres acteurs du territoire.

  • Pré-sélection de thématiques à approfondir

    • Saisir l’opportunité donnée par le décret 2016-824 du 21 juin 2016 de prolonger le diagnostic sociodémographique par des analyses complémentaires, dans le but d’affiner le programme d’actions sociales locales. 
    • Pour cela, pré-sélectionner des idées de thèmes à soumettre au Conseil d’administration du CCAS/CIAS (exemples : problématiques se dégageant du diagnostic comme primordiales à traiter par les politiques communales, sujets méconnus pour lesquels une enquête exploratoire est à mener, étude de publics en évolution, analyse du fonctionnement d’un dispositif particulier, approfondissement des dynamiques de quartier, etc.). 

Mémo : à cette étape, penser à… 
  • Ne pas accumuler des données chiffrées par excès, ce qui pourrait complexifier l’opérationnalité de l’ABS, mais opter plutôt pour un usage raisonné d’indicateurs. 
  • Aller au-delà de la seule description du territoire pour viser la compréhension des besoins, grâce à un travail approfondi sur l’interprétation des indicateurs et du sens à leur donner.
  • Garder à l’esprit la fonction de l’ABS en tant qu’outil d’aide à la décision politique : son objectif opérationnel d’aide à la définition d’actions cohérentes par rapport aux besoins de la population du territoire doit transparaître dans le rapport.
  • Mener en parallèle les phases de collecte, traitement et analyse partagée des données plutôt que par étapes successives : il est intéressant de réaliser des allers-retours entre ces opérations (exemples : les échanges en groupes de travail mèneront éventuellement à de nouveaux questionnements et à la recherche d’informations complémentaires, inversement certains échanges pourront être valorisés comme des informations qualitatives à intégrer dans la partie « données » de l’ABS).
Etape 3 /Valoriser les résultats de son ABS
  • Rédaction d’un rapport d’analyse

    • Formalisation écrite du portrait sociodémographique à partir de l’ensemble des données collectées, avec intégration si possible de tableaux, graphiques, cartographies, citations…
    • Dans le rapport, mise en avant des axes prioritaires pour le CCAS/CIAS et formulation de préconisations pour les politiques locales.
    • Discussion et validation par le comité de pilotage de l’ABS. 

  • Présentation, mise en débat et finalisation du rapport

    • Présentation avant la fin 2021 du rapport au conseil d’administration du CCAS/CIAS, échanges et reprise du rapport avec les éléments à modifier / ajouter. 
    • Restitution si possible en conseil municipal.
    • Après validation, organisation si possible d’un événement autour de la restitution de l’ABS auprès de l’ensemble des parties prenantes du projet et si possible ouvert à l’ensemble des services de la Ville/Intercommunalité, partenaires et population.

  • Communication des résultats définitifs

    • Production de livrables visuels et accessibles pour diffuser les résultats de l’ABS : synthèse du rapport, articles, brèves, etc.
    • Diffusion en interne au CCAS/CIAS, à la Ville/Intercommunalité, mais aussi à l’ensemble des parties prenantes du projet et à la population. 

Mémo : à cette étape, penser à…
  • Dans le rapport d’ABS, restituer pour chaque ensemble de données présentées les enjeux afférents et donner un éclairage sur des pistes d’action potentielles (exemple : chiffres attestant d’une tendance à l’augmentation du nombre de personnes âgées sur un territoire > enjeux de la perte d’autonomie, du lien social, des ressources, de la mobilité, des loisirs > pistes d’action sur le maintien à domicile ou le développement de structures dédiées, le soutien aux aidants, l’accès aux droits, la mise à disposition d’une navette, les partenariats avec le milieu associatif, etc.).
  • Multiplier les canaux de diffusion pour communiquer sur les résultats du portrait sociodémographique : courrier du/de la Maire, newsletter, réseaux sociaux, site du CCAS/CIAS et/ou de la Ville/Intercommunalité, flyer à distribuer…
Etape 4 /Définir les suites de l’ABS et passer à l’action
  • Validation des orientations prioritaires

    • A partir des données de l’ABS, de ses préconisations et des échanges menés entre acteurs, définition des orientations prioritaires pour les politiques locales afin de couvrir les besoins de la population insatisfaits par l’offre sociale existante.
    • Si à ce stade du portrait sociodémographique (avant que les analyses thématiques complémentaires optionnelles ne soient enclenchées et apportent des éléments complémentaires et des précisions sur des interrogations restantes), des pistes d’actions concrètes émergent déjà de façon précise, élaboration d’un plan d’actions portant sur les éventuels projets à déployer / dispositifs à faire évoluer / partenariats à développer / plans de communication à lancer.

  • Sélection des analyses thématiques à mener les années suivantes

    • Sélection des sujets qui émergent comme primordiaux à creuser, planification du programme d’analyses thématiques à lancer les années suivantes (en option selon le décret 2016-824 du 21 juin 2016).

Mémo : à cette étape, penser à…
  • Formaliser le programme d’actions locales découlant de l’ABS afin de pouvoir rendre compte de l’atteinte de l’objectif de l’ABS (définir les politiques à mener pour couvrir les besoins auxquels aucune réponse satisfaisante n’est apportée) et le valoriser.
  • Informer les divers contributeurs de l’ABS des suites du projet : programme d’analyses thématiques et plan d’actions locales.
  • Garder à l’esprit que le programme d’analyses thématiques complémentaires au portrait sociodémographique pourrait être amené à évoluer en fonction d’imprévus : conserver une certaine souplesse dans sa planification afin qu’il puisse s’adapter si nécessaire à l’actualité.
Etape 5 /Organiser une veille et une évaluation
  • Etat des lieux à N+1

    • Un an après la restitution du portrait sociodémographique, prévoir une réunion afin de : 
      • Faire le bilan du portrait sociodémographique.
      • Suivre l’avancement du programme d’actions locales.
      • Relancer une dynamique et faire vivre le lien entre observation sociale et action locale.

  • Veille et travail sur des analyses thématiques (optionnelles) les années suivantes

    • Organisation d’une veille sociale sur le territoire afin d’actualiser la connaissance du territoire au fil de la disponibilité de nouvelles données (enjeu de déploiement de politiques publiques adaptées en continu aux besoins des habitants), mais aussi faciliter le renouvellement du diagnostic sociodémographique en début de mandat prochain.
    • Poursuite de l’ABS sous la forme d’analyses complémentaires au portrait sociodémographique pour approfondir les sujets-clé pour les politiques communales, obtenir davantage de précisions sur des publics cibles, des dispositifs, etc.
      • Démarche similaire à la réalisation du diagnostic sociodémographique (collecte de données supplémentaires, analyse partagée, formulation de préconisations, valorisation…).

  • Evaluation en fin de mandat

    • En fin de mandat municipal, possibilité d’évaluation de l’ensemble de la démarche d’ABS : 
      • A-t-elle atteint les objectifs fixés aux origines du projet ? 
      • A-t-elle permis d’améliorer la connaissance du territoire et de faire progresser l’action locale au service des habitants ? 
      • Les analyses complémentaires optionnelles ont-elles permis d’aller plus loin dans l’éclairage de certaines thématiques ? 
    • Formalisation des retours d’expériences des parties prenantes de l’ABS pour en tenir compte dans l’organisation de la prochaine analyse des besoins sociaux.
    • Possibilité de mise à jour de l’analyse de l’adéquation entre l’offre sociale locale et les besoins des habitants, en intégrant dans l’analyse le programme d’actions mis en œuvre après l’ABS.

Mémo : à cette étape, penser à…
  • Dans le travail sur les analyses complémentaires, solliciter les partenaires intervenant sur les thématiques investiguées et si possible les citoyens concernés pour apporter leurs différents regards (exemple pour une analyse thématique consacrée à la petite enfance : services de la Ville / Intercommunalité impliqués, Conseil départemental, CAF, UDAF, crèches et autres modes de garde présents sur le territoire, pédiatres, familles…). L’aspect circonscrit des analyses thématiques les rend particulièrement favorables à une dynamique d’analyse partagée avec des partenaires ciblés, apportant leur expertise pour la mise en place d’actions très précises (par rapport au diagnostic sociodémographique, qui peut laisser imaginer des pistes d’action à portée plus générale).

Pour aller plus loin

L’UNCCAS met à disposition de ses adhérents différentes fiches pratiques pouvant fournir une aide précieuse dans la réalisation de l’analyse des besoins sociaux.

Liens et téléchargements